Trois questions à Andrea Zini, Vice-président de l’EFFE et d’Assindatcolf Actualités Trois questions à Andrea Zini, Vice-président de l’EFFE et d’Assindatcolf
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Trois questions à Andrea Zini, Vice-président de l’EFFE et d’Assindatcolf

29 novembre 2018

Question 1 – Quel est le rôle d’Assindatcolf en Italie ?

Cette année, Assindatcolf célébrera ses 35 ans d’existence. Depuis sa création, l’association a continuellement fourni un précieux soutien aux familles en matière d’équilibre entre vie privée et vie professionnelle. Nos efforts en Italie, notamment au cours des cinq dernières années, ont été précisément orientés dans cette direction, à savoir rendre l’accompagnement au domicile rémunéré accessible à ceux qui en ont besoin. C’est pourquoi nous renouvelons constamment auprès du gouvernement italien notre demande d’intégrer, de manière plus ou moins conséquente, une réduction d’impôts sur les coûts soutenus par les familles employeuses de personnel de ménage, de garde d’enfants ou de soins à la personne. A ce jour, cette demande que nous formulons n’a malheureusement toujours pas trouvé de réponse.

Question 2 – Comment et pourquoi votre organisation s’investit-elle à l’échelle européenne ?

La réponse se trouve dans le peu d’intérêt et d’attention accordés par le Gouvernement et le Parlement italiens à notre activité. Nous avons trouvé différents partenaires en Europe, de plus ou moins grande importance, mais qui tous reconnaissent la fonction sociale centrale du travail domestique autant du côté des employeurs que de celui des employé-e-s, majoritairement féminines.

L’EFFE, la fédération européenne qui nous rassemble avec nos partenaires, permet de faire entendre nos intérêts de manière beaucoup plus puissante et coordonnée et, en tant que représentante des requêtes de tout un secteur, est susceptible de les faire entendre davantage. C’est pourquoi nous fournissons des efforts considérables pour inclure une variété de caractéristiques et de solutions dans le Livre Blanc sur le travail domestique en Europe, aujourd’hui prêt à être diffusé. Nos propositions seront-elles appliquées ? Nous n’en savons rien. Ce que nous savons est qu’elles fournissent de réelles indications, élaborées par des experts dans le domaine. Je crois personnellement qu’elles ne peuvent que fournir des résultats pertinents.

Une seconde raison, d’égale importance, vient des ressources que l’Union européenne s’efforce d’étendre à différents projets. Cela nous permet d’effectuer de la recherche et ainsi de développer des modèles de gestion du travail domestique toujours plus avancés. Tous les projets qui ont été approuvés, en cours de réalisation ou actuellement achevés ont confirmé notre conviction.  Pour n’en citer que quelques-uns, PRODOME, CARER+, ou encore Ad-PHS sont actuellement en cours d’évaluation. Grâce à ces projets, nous sommes devenus plus visibles à la fois en Italie ainsi qu’en Europe.

Question 3 – Que pensez-vous de la directive « Equilibre vie professionnelle/vie privée » actuellement au centre des négociations interinstitutionnelles entre la Commission, le Conseil et le Parlement ?

Dans un monde chaotique et complexe, du à la constante évolution des rythmes de vie, du progrès technologique et, pourquoi pas de la création de richesse, il y a un besoin important de repenser les modèles de vie privée et par voie de conséquence, la relation entre les individus et leur activité socioéconomique.

Trouver un nouvel équilibre entre les deux n’est pas une mince affaire. Beaucoup de priorités contrastent les unes avec les autres, l’organisation collective s’oppose à l’organisation individuelle et les cadres législatifs varient d’Etat en Etat. Néanmoins beaucoup d’espoir se dégage de toutes ces problématiques.

C’est pourquoi je crois que l’emploi à domicile est un modèle hautement flexible qui permettra d’atteindre une gestion de l’équilibre entre vie privée et vie professionnelle bien plus efficace. Dans les faits, le cœur de la directive en cours de négociation se découpe en deux éléments essentiels : la rémunération et les congés. Il est plutôt facile de saisir l’importance de ces deux thématiques réglementaires, mais elles ne seront malheureusement jamais suffisamment flexibles pour être reconnues comme satisfaisantes par les parties en jeu.

Il n’est en réalité pas chose aisée de gérer en termes de communication et de programmation les montants des indemnités et les congés intermittents ou imprévus. Ceux-ci ne sont pas compatibles avec des concepts tels que le contrôle budgétaire de l’Etat ou le contrôle de la productivité des entreprises. Nous voudrions tous qu’il y ait suffisamment de places en crèche, qu’il existe des écoles maternelles et primaires qui resteraient à terme ouvertes 24h/24 et 7j/7, ou qu’il existe des unités de soins prolongés ou des centres d’accueil pour les personnes âgées, en situation de handicap ou dépendantes, et qui pourraient accueillir de manière immédiate et sans réservation. Cela n’est pas possible en l’état actuel des choses, et nous ne trouverons probablement jamais les ressources suffisantes pour espérer que de telles institutions voient le jour.

Il faut aussi souligner que les problèmes de dépendance ne sont pas les seuls qui se présenteront au cours d’une vie. D’autres problématiques telles que les discriminations professionnelles envers les femmes, leurs moindres opportunités de carrière, et l’écart salarial entre les sexes font aussi partie intégrante du débat sur l’équilibre entre vie privée et vie professionnelle ; avec les mêmes éléments d’imprévisibilité et les coûts inhérents à des individus en situation de dépendance.

C’est pourquoi je crois fermement que la directive devrait inclure la question de comment soutenir les familles employeuses. Les gardes d’enfants, auxiliaires de vie et femmes de ménage représentent un nombre très large d’employées, souvent rémunérés au noir directement par les familles. Ces employées représentent le véritable outil de flexibilité par lequel les familles parviennent à organiser leur vie quotidienne sans avoir à sacrifier leur vie professionnelle ou leur vie privée.

Elles représentent avant tout un soutien indispensable aux femmes, autant aux employées du domicile qu’aux femmes employeuses. Un soutien qui s’avère également être le moteur d’un ascenseur social presque toujours bloqué en l’absence de conciliation des temps de travail.

Voilà pourquoi nous devons fortement inciter les Etats-membres ainsi que les entreprises à investir davantage dans le bien-être familial. Nous devons fournir un soutien fiscal et contributif. Nous devons encourager la professionnalisation de l’emploi à domicile, notamment par le biais d’un recours plus fréquent à la qualification, à la formation et à l’élaboration de certifications pour les employés du domicile. De tels outils conduiraient à une gestion plus flexible du temps de travail et à un meilleur équilibre entre vie privée et vie professionnelle, et pourraient aller jusqu’à créer de l’activité économique à des millions de travailleurs invisibles au sein de l’Union européenne, essentiellement des femmes immigrées.

Il m’a déjà été reproché un biais « raciste » dans la mesure où les classes populaires sont fréquemment identifiées comme principales fournisseuses d’employé-e-s à domicile. Je reconnais en partie ce problème car une telle discrimination est aujourd’hui bien réelle. Mais à ceux qui avancent que les ghettos ne peuvent trouver de régulation spécifique, je réponds en disant qu’il est bien pire de laisser le problème tel qu’il est, et que le type de solution que nous proposons profiterait largement et également aux familles employeuses ainsi qu’aux employés à domicile.

Le jour où l’on me présentera une solution concrète pour résoudre les problèmes liés à l’équilibre entre vie privée et professionnelle qui se concentrera prioritairement sur l’emploi souterrain, je serai le premier à l’accueillir positivement. Dans l’état actuel des choses, minimiser l’importance du problème et choisir de ne pas l’inclure dans la directive ou du moins dans sa version de travail, équivaut selon moi à opter pour l’immobilisme et à ne pas reconnaître la dimension réelle et quotidienne du problème pour des millions d’Européens.

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